Les ivoiriens aiment bien manger. Et manger ici s’apparente parfaitement à une religion et ses rites. Et ça tombe bien, il y a le Festival des grillades.

Le festival des grillades s’impose désormais comme une institution, une règle établie. Comme une religion, le rendez-vous gastronomique par essence et par excellence fait converger chaque année, vers un seul et même endroit, des milliers de pèlerins. Disons de fidèles. Corps – et âmes – se passionnent pour l’assortiment très large de mets délicatement concoctés et soigneusement exposés à l’appétit de Gargantua des curieux.

Les visiteurs des stands, comme tous visiteurs d’un lieu de culte, sont tantôt des habitués, habités par la foi irréductible dans les bienfaits de la table servie. Tantôt des nouveaux venus dans un monde inconnu ou méconnu, guidés soit par la curiosité vorace, soit victimes directes du téléphone arabe. Nul ne voudrait se faire conter le rendez-vous annuel. À l’approche de la grand-messe, la bonne nouvelle se propage à une vitesse insondable au point qu’elle a fini par gagner quelques pays de la sous-région ouest-africaine. Le concept est repris avec la prévisible déperdition que cela implique. L’intitulé est reformulé selon qu’on évolue d’un pays à autre. Mais le contenu demeure presque le même. C’est tant mieux ! Peu importe le lieu et les conditions du culte, ce qui prime, c’est le message prêché. En famille ou entre amis. Sous un hangar ou sur des chaises de fortune. L’appétit des visiteurs du festival ne ploie guère. Au contraire, la sensation du délice ineffable et les retrouvailles consolidées autour de repas bien des fois inédits renforcent intrinsèquement toute la pertinence du rendez-vous. 

Le Festival des grillade  a raflé en seulement cinq éditions la palme d’or de l’évènement au succès incontesté. Populations et annonceurs se bousculent. Cordons bleus et restaurateurs avérés rivalisent d’innovations pour que les éditions se suivent et se renouvèlent avec chaque fois un soupçon de renouveau. Un zest de bonheur épicé. Une pincée d’arôme de réconciliation. Car il n’est plus à démontrer que les adversités et les querelles se taisent le temps d’un repas. D’ailleurs, ne faudrait-il pas envisager un Festival des grillades plus régulier pour faire oublier les antagonismes ? Je m’interroge tout juste. En attendant les conclusions de vos réflexions respectives, mangez et festoyez … vous aurez prié, qui sait ?